Carré sommable

En mathématiques, une fonction définie sur un espace mesuré Ω et à valeurs dans ou ℂ est dite de carré sommable ou de carré intégrable si elle appartient à l’espace L2(Ω) des fonctions dont l'intégrale du carré (du module dans le cas des nombres complexes) converge sur Ω.

Par exemple, une fonction mesurable f {\displaystyle f} de ℝ dans ℂ est de carré sommable lorsque l’intégrale suivante (au sens de Lebesgue)

R | f ( x ) | 2   d x {\displaystyle \int _{\mathbb {R} }|f(x)|^{2}~\mathrm {d} x}

converge, c'est-à-dire si elle existe et correspond ainsi à un nombre fini.

Définition formelle

Article détaillé : Espace Lp.

Considérons les fonctions mesurables définies sur l’ensemble ℝ et à valeurs dans ℂ dont l’intégrale (au sens de Lebesgue) du carré du module converge[1]. Ces fonctions constituent un espace vectoriel ℒ2(ℝ) qui, grâce à l'inégalité de Hölder, peut être muni de la forme hermitienne positive définie par

( f , g ) 2 = R f ( x ) g ¯ ( x ) d x {\displaystyle (f,g)_{2}=\int _{\mathbb {R} }f(x){\overline {g}}(x)\,\mathrm {d} x}

et de la semi-norme correspondante

f 2 = ( R | f ( x ) | 2   d x ) 1 / 2 . {\displaystyle \|f\|_{2}=\left(\int _{\mathbb {R} }|f(x)|^{2}~\mathrm {d} x\right)^{1/2}.}

Puisqu’une fonction f {\displaystyle f} de ℒ2(ℝ) peut rester indéfinie sur un ensemble de mesure nulle sans affecter les intégrales précédentes, la relation d'équivalence « est égale presque partout » permet de constituer des classes de fonctions (notées provisoirement [ f ] {\displaystyle [f]} ) : deux fonctions sont alors dans la même classe si elles sont « égales presque partout », c’est-à-dire égales en dehors d’un ensemble de mesure nulle. L’ensemble de ces classes constitue l’espace vectoriel L2(ℝ).

Puisque le noyau de la semi-norme est l’ensemble des fonctions négligeables (c'est-à-dire nulles presque partout) de ℒ2(ℝ), l’espace L2(ℝ) acquiert une structure d’espace de Hilbert à l’aide du produit scalaire

( [ f ] , [ g ] ) 2 = R f ( x ) g ¯ ( x )   d x {\displaystyle ([f],[g])_{2}=\int _{\mathbb {R} }f(x){\overline {g}}(x)~\mathrm {d} x}

et de la norme correspondante

[ f ] 2 = ( R | f ( x ) | 2   d x ) 1 / 2 . {\displaystyle \|[f]\|_{2}=\left(\int _{\mathbb {R} }|f(x)|^{2}~\mathrm {d} x\right)^{1/2}.}

Ces intégrales ne dépendent pas des représentants f {\displaystyle f} ou g {\displaystyle g} de ℒ2(ℝ) choisis pour caractériser les classes [ f ] {\displaystyle [f]} ou [ g ] {\displaystyle [g]} de L2(ℝ).

Simplification en passant aux fonctions définies presque partout

Il est commode et fréquent d’identifier une fonction f {\displaystyle f} de ℒ2(ℝ) à sa classe [ f ] {\displaystyle [f]} dans L2(ℝ). Ainsi :

  • L’espace L2(ℝ) des fonctions de carré sommable est l’ensemble des (classes d'égalité presque partout de) fonctions mesurables définies presque partout sur ℝ et à valeurs dans ℝ ou ℂ, telles que le carré de leur module soit Lebesgue-intégrable sur ℝ.
  • L2(ℝ) est un espace de Hilbert lorsqu’il est muni du produit scalaire
( f , g ) 2 = R f ( x ) g ¯ ( x )   d x . {\displaystyle (f,g)_{2}=\int _{\mathbb {R} }f(x){\overline {g}}(x)~\mathrm {d} x.}

Quelques propriétés

En tant qu’espace de Hilbert, L2(ℝ) est un espace complet :

Si une suite ( f n ) n N {\displaystyle (f_{n})_{n\in \mathbb {N} }} dans L2(ℝ) est de Cauchy, alors il existe une limite f {\displaystyle f} dans L2(ℝ) (c'est-à-dire une fonction définie presque partout sur ℝ et de carré sommable) telle que
lim n R | f f n | 2   d x = 0. {\displaystyle \lim _{n\to \infty }\int _{\mathbb {R} }|f-f_{n}|^{2}~\mathrm {d} x=0.}

C’est la notion de convergence en moyenne quadratique. Elle n’implique pas nécessairement la convergence ponctuelle presque partout.

Cependant, de toute suite convergente de L2(ℝ), on peut extraire une sous-suite qui converge ponctuellement presque partout. En d’autres termes, si ( f n ) n N {\displaystyle (f_{n})_{n\in \mathbb {N} }} converge vers f {\displaystyle f} en moyenne quadratique, on peut trouver une partie infinie K {\displaystyle K} de ℕ et un ensemble E {\displaystyle E} de mesure nulle tels que

x E , lim n K , n f n ( x ) = f ( x ) . {\displaystyle \forall x\notin E,\quad \lim _{n\in K,n\to \infty }f_{n}(x)=f(x).}

Le théorème de convergence dominée fournit une condition suffisante de convergence en moyenne quadratique :

Soit ( f n ) n N {\displaystyle (f_{n})_{n\in \mathbb {N} }} une suite dans L2(ℝ) qui converge presque partout vers une limite f {\displaystyle f} . S’il existe une fonction h {\displaystyle h} dans L2(ℝ) et un ensemble E {\displaystyle E} de mesure nulle tels que
x E , | f n ( x ) | h ( x ) , {\displaystyle \forall x\notin E,\quad |f_{n}(x)|\leq h(x),}
alors ( f n ) n N {\displaystyle (f_{n})_{n\in \mathbb {N} }} converge en moyenne quadratique vers f {\displaystyle f} .

Les fonctions de carré sommable en physique

En physique quantique, une fonction d'onde | Ψ ( r , t ) {\displaystyle |\Psi ({\vec {r}},t)\rangle } associée à une particule est de carré sommable relativement à la variable spatiale. Physiquement, en effet, le carré du module de la fonction d'onde | Ψ ( r , t ) {\displaystyle |\Psi ({\vec {r}},t)\rangle } est une densité de probabilité de présence de la particule au point r {\displaystyle {\vec {r}}} et à l'instant t {\displaystyle t} . Par conséquent, l'intégrale de ce carré vaut 1, puisque la particule se trouve quelque part dans l'espace. En termes plus mathématiques, une fonction d'onde est de norme 1 dans l'espace des fonctions de carré sommable.

Note

  1. ℝ est ici muni à la fois de la tribu de Lebesgue et de la mesure de Lebesgue.

Voir aussi

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